Six pétroliers demandent un prix « ambitieux » du carbone

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Six majors pétrolières européennes ont appelé lundi « à donner un prix au carbone « . « Nous avons la ferme conviction qu’un prix du carbone permettra de se détourner des options les plus émissives, et apportera la visibilité nécessaire pour dynamiser les investissements dans les technologies bas carbone et les ressources les plus pertinentes au rythme adéquat », ont justifié, dans un communiqué commun, les dirigeants de Total, Shell, Statoil, BP, Eni et BG Group. Elles ont, à cet effet, adressé un courrier à Laurent Fabius, qui présidera la conférence sur le climat (COP21) en fin d’année à Paris, et à la secrétaire exécutive de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). « Nous sommes responsables, on ne le nie pas, d’une partie significative des émissions de CO2 mais parce que nous connaissons ces business, nous détenons une grande partie des solutions », a expliqué, à l’occasion d’un point presse lundi, le directeur général de Total, Patrick Pouyanné.

L’appel des majors, qui intervient à l’occasion du Congrès mondial du gaz qui se tient cette semaine à Paris, est un message envoyé pour rééquilibrer la compétitivité du gaz par rapport au charbon, deux fois plus émetteur de CO, pour produire de l’électricité. « Si vous remplacez toutes les centrales au charbon par des centrales au gaz, cela permettrait d’économiser 5 milliards de tonnes de CO, soit 10 % des émissions mondiales liées à l’activité humaine », a estimé Jérôme Schmitt, directeur du développement durable de Total. L’essor du gaz de schiste aux Etats-Unis a renforcé la compétitivité du charbon, encore qualifié de « colonne vertébrale de la production d’électricité dans le monde «  par l’Agence internationale de l’énergie.

« Les pétroliers préfèrent un prix du CO qui répartisse la contrainte en la faisant d’abord peser sur les centrales au charbon plutôt qu’une approche qui durcirait les normes d’émissions sur ses principaux clients que sont les constructeurs automobiles », analyse Emmanuel Fages, consultant chez Roland Berger. « Aujourd’hui, tout le monde demande un prix du carbone. Les pétroliers ont tout intérêt à se montrer pro-actifs et ils ne prennent pas un grand risque, parce que toutes les tentatives récentes ont échoué ou se sont traduites par des conséquences peu contraignantes, les Etats redoutant l’impact sur l’emploi ou la compétitivité », estime aussi un expert.

Sans fixer de prix – « parce que nous ne sommes pas seuls » -, Patrick Pouyanné a indiqué que ces « mécanismes de tarification doivent être stables, transparents et ambitieux « , évaluant tout de même autour de 40 dollars la tonne de CO le point d’équilibre entre gaz et charbon pour produire de l’électricité.

Quant à la technologie émergente de capture et stockage du carbone (CCS), elle nécessiterait un prix de 80 à 100 dollars la tonne pour être rentable, a jugé le patron de Total, qui produit déjà autant de gaz que de pétrole et devrait voir la part du premier s’accroître encore ces prochaines années.